Etat des lieux et enjeux

La production porcine en Bretagne est sous le feu des projecteurs depuis plusieurs années. En cause principalement le phénomène des algues vertes lié à la concentration des animaux. Mais aussi l’économie, avec un revenu agricole parmi les plus faibles de France, la disparition d’exploitations et les fermetures d’abattoirs.

Parallèlement une demande sociétale de pratiques respectant l’animal se développe. Tous ces aspects questionnent la pertinence d’un modèle de production porcine largement orientée vers le hors-sol et la gestion des déjections liquides animales.

Pourtant des solutions existent avec des systèmes d’élevage bons pour l’économie, l’environnement et le social. Ils se construisent autour de circuits de proximité par une réappropriation du marché intérieur et local.

Les fermes deviennent usines

La Bretagne concentre sur 6,5% du territoire national près de 57% de la production française pour un cheptel de 7,7 millions de porcs. Mais entre 2000 et 2010, la Bretagne a perdu le tiers de ses exploitations.

Dans le même temps, la moyenne passait de 900 porcs par exploitation à plus de 1300. L’augmentation de la taille des élevages transforme les fermes en usines et fractionne le travail des éleveurs en plusieurs postes de travail spécialisés. Choisir de produire de manière intensive conduit à gérer les déjections de manière industrielle, donc à investir de manière industrielle rendant impossible la transmission et l’installation de jeunes agriculteurs.

Tensions sur les marges

L’élevage porcin en France est à 90 % un élevage industriel en concurrence frontale avec ses voisins européens. Une concurrence exacerbée qui se traduit par une lutte féroce sur les prix. En termes de commerce extérieur la France est déficitaire en valeur. Elle importe des produits transformés et exporte des produits faiblement transformés comme les porcs vivants, carcasses, ou pièces avec os. Au total, le prix du porc en France suit donc le cours européen âprement surveillé par les quelques gros acheteurs de la filière, à l’affût du moindre coût.

Dans cette logique effrénée les marges se resserrent. Les éleveurs sont dépendants des prix des aliments qui eux mêmes suivent l’évolution des cours mondiaux confrontés à une demande soutenue.

A la concentration et la disparition des exploitations, s’ajoutent les difficultés dans la filière aval, abattoirs et transformateurs.

Tensions environnementales

La concentration des élevages sur caillebotis et son corollaire la gestion des déjections liquides est une équation complexe. Les déjections porcines contiennent une importante quantité d’azote.

Le lisier est souvent utilisé pour la fertilisation des cultures mais une partie de cet azote n’est pas totalement absorbée par les plantes, et se retrouve, après le lessivage des terres, sous forme de nitrates dans les eaux. Symbole de cette pollution, le phénomène des algues vertes est connu depuis les années 70. Après 20 années d’application de la directive nitrates (Directive 91/676/CEE 12 décembre 1991) et malgré les efforts entrepris par les éleveurs, la France reste sous la menace de sanction européenne. A cela s’ajoute les pollutions olfactives générées et difficilement acceptées par la société civile. Les alternatives comme l’élevage de porcs sur litière sont peu étudiées par la R&D (étude Robin/Souloumiac/Oliveira/Kermarrec INRA RENNES décembre 1999 ; étude CRAB/CRAPL/IFIP/INRA 2012). »

Normes européennes

Répondant à une demande sociétale de plus en plus forte, les normes européennes de bien être animal se durcissent. Le bien être animal faisait déjà l’objet d’une directive de 2001 transposée en 2003 en France. En 2013 seul 72 % des élevages français respectaient par exemple le maintien en groupe des truies. Les éleveurs sont confrontés à une programmation d’investissements quelque soit la conduite

d’élevages qu’ils choisissent. Améliorer la condition de vie des porcs, éviter la douleur, réduire les médicaments sont des orientations qui influent de plus en plus sur l’établissement des normes.

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Pourquoi produire autrement ?

A toutes ces interrogations et au tout-intensif, la démarche Cohérence propose une alternative de territoire. Un modèle qui s’intègre dans une économie locale et fait vivre les éleveurs, abatteurs et bouchers.

La qualité, la valeur ajoutée de l’éleveur est valorisée dans une relation concertée entre les acteurs. Le travail de Cohérence part du terrain, des élevages. Il montre que pour les éleveurs, une partie de la solution réside dans la reprise de l’autonomie de l’exploitation. Choisir son modèle de production, définir la qualité de son produit et sa stratégie de distribution pour s’affranchir des secousses des marchés mondiaux. La démarche protège l’environnement et s’insère dans les projets agro-écologiques et la préservation de la qualité de l’eau et de la biodiversité pour lesquels les collectivités territoriales, acteurs clés, peuvent lever des moyens d’actions.

Concilier production, revenu et environnement

Produire un porc sur litière demande plus d’aliment et plus d’espace par porc. La valorisation doit rémunérer la qualité et nécessite donc un label. La commercialisation des porcs sur litière doit donc se faire hors du circuit classique de la grille de paiement Uni porc Ouest. La valorisation se fait en circuits de proximité, sur la base de relations respectueuses et équitables construites entre les différentes parties prenantes.

Cohérence accompagne depuis son origine un collectif d’une dizaine d’éleveurs de porcs sur paille identifiés Cohérence qui ont fait le choix de sortir du modèle d’intégration tel qu’on le connaît dans le système porcin conventionnel en valorisant leur production en vente directe.

Cohérence a permis également la création d’une marque « Le porc authentique élevé sur paille ». Aujourd’hui, la filière compte deux éleveurs identifiés Cohérence qui fournissent directement à treize bouchers en Pays de Saint Brieuc.

Ces deux modèles de filières de valorisation « en vente directe » et « courte et locale » ont ainsi permis de mettre en commercialisation en 2013 un volume de 4500 porcs charcutiers auprès de clients tels que les artisans bouchers charcutiers, la restauration collective, quelques enseignes de la grande distribution mais également directement les consommateurs via les marchés ainsi que les locaux de vente en directe.

Cohérence soutient également la consommation de porcs issus de l’agriculture biologique qui s’inscrit dans la logique du développement durable.

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